La carte d’identité ne coûte pas cher !

Depuis quelques jours, j’entends une levée de bouclier au sujet de la carte nationale d’identité, dont certains observateurs seraient en train de dire qu’elle coute dorénavant très cher ! En effet, le prix de sa confection va effectivement passer du simple au double, mais : peut-on réellement considérer que cette pièce d’identité sera très onéreuse ?

Pour commencer, rappelons que le prix de la CNI actuellement coûte aux environs de 10 000 FCFA. Entre les frais de timbre qui s’élèvent à 2 800 FCFA, la légalisation de l’acte de naissance, le certificat de nationalité et les frais de transport, on tourne bien autour de ce montant. Avec la nouvelle formule, tous ces frais resteront les mêmes. À l’exception du timbre qui passera sans transition de 2 800 FCFA à 10 000 FCFA d’un coup ; ce qui ramènera le coût total de l’établissement de la carte nationale d’identité, à sensiblement 16 000 francs CFA...

Bon, une fois qu’on a fin avec les chiffres, revenons au sujet. En l’état actuel, la CNI ne coûte « que » moins de dix mille francs, mais pour quel résultat ? Les problèmes d’identification sont multiples, les délais de livraison de la CNI sont très longs voire interminables. Il n’est pas rare de voir des gens qui fonctionnent avec leur récépissé depuis un an, deux ans, trois ans, et qui ne font que le renouveler tous les six dans les commissariats de notre République.

Pire, le passeport qui est censé dériver de la pièce nationale d’identité, est délivré en 48 heures ! Certes il coûte beaucoup plus cher (110 000 FCFA pour un passeport ordinaire), mais paradoxalement personne ne s’en plaint. Certainement à cause de son utilité pour aller au Canada, à cause de son « prestige », à cause de son impérativité pour accéder à un avion international, etc.
Bref, le passeport coûte dix fois plus cher, et c’est normal ! Avec la nouvelle technologie, son délai de livraison est passé à 48 heures seulement, pour la plus grande satisfaction de tous les usagers.

Pourquoi dit-on que la CNI va coûter très cher ?

Eh bien c’est de la démagogie, tout simplement. C’est de la mauvaise foi, c’est de l’hypocrisie, c’est de la manipulation politique. Car dans le même temps, on ne rappelle pas que les conditions de traitement seront meilleures, que les délais de délivrance seront réduits à 48 heures également, et que les centres opérationnels seront multipliés sur tout l’ensemble de notre territoire.
On ne dit pas non plus que la CNI va conserver sa même durée de validité, c'est-à-dire dix ans, et qu’elle contiendra des informations biométriques et digitales qui permettront de devenir facilement identifiable sur les terminaux, et de gagner ainsi en sécurité et en réactivité. Pourquoi on n’insiste pas plutôt sur ces points positifs ?

Certes on peut reprocher que ce nouveau projet soit porté par des étrangers, mais là il s’agit d’un autre sujet. On peut reprocher que 90 % des frais d’établissement seront réservés à cet opérateur étranger qui pourra ainsi faire exporter nos devises, mais là il s’agit plutôt d’une mauvaise décision stratégique de la part de nos gouvernants.

En ce qui concerne le prix en lui-même, je ne le trouve nullement exorbitant ! Les Camerounais s’offrent des cuvettes de bières tous les soirs dans les snack-bars, et ils viennent se plaindre pour le prix de la CNI. Ils jouent des sommes faramineuses dans les jeux de hasard, sans que cela n’offusque personne. Ils s’investissent à hauteur de millions de francs CFA pour amadouer le cœur de certaines prostituées, et généralement ils en ont même plusieurs.
Mais pour une pièce d’identité qui leur sera indispensable, ils veulent sortir l’argument de la cherté et du contexte difficile des Camerounais. C’est faux !
Mes compatriotes sont indigents pour la plupart, mais au moins ils arrivent à manger, à boire, à se vêtir et à envoyer presque tous leurs enfants à l’école. La carte nationale d’identité est un sésame, que dis-je, une obligation citoyenne. Et si quelqu’un veut user de la mauvaise foi pour ne pas s’en munir, eh bien il ne faut qu’il essaie de se prévaloir de ses propres turpides.

Ecclésiaste Deudjui
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