Message à la jeunesse Ndowè
Ne dit-on pas que la jeunesse est le fer de lance de la nation ? Je suis convaincu que 9 personnes sur 10 qui utilisent cette expression dans la communauté Ndowè et même dans l'ensemble du pays ignorent le sens et les implications de celle ci. Et bien, fer de lance veut dire : Élément progressiste et efficace qui, au sens figuré, désigne une personne ou une idée dynamique considérée comme une motivation. En Afrique du Sud « fer de lance de la nation », était la branche militaire du Congrès national africain qui agissait en collaboration avec le Parti communiste sud-africain contre le régime d'apartheid alors au pouvoir.

Je donne ces explications pour que le jeune Ndowè comprenne ce qu'il représente pour sa communauté d'abord avant sa nation. Il est évident que le contexte actuel que nous imposent les différents projets implémentés dans notre contré, et le traitement réservé aux autochtones n'est pas éloigné de l'idéologie de l'apartheid. Les terres sont réquisitionnées sans consultation, les populations déguerpies sans dédommagements, le non emploi des jeunes locaux dans les entreprises et différents projets restant injustifié.
Alors, avons nous besoin de plus pour comprendre que l'heure est à une véritable union, à une stratégie commune pour une sortie commune des différentes ethnies qui constituent cet ensemble de son embrigadement?
La surprise est que les jeunes qui sont sensés rompre avec les habitudes toxiques de la division qu'ont alimenté certains aînés en sont les premiers chantres.
Laisser parler les émotions au lieu de la science juste pour construire un égo c'est manquer non seulement de vision mais c'est aussi une preuve de l'ignorance de l'histoire et de l'ethnologie.
Les connaissances acquises des livres d'histoire et l'expérience du vécu car ayant grandi toute ma vie dans cette contré; ne m'enseignent pas que le Banohò a soumis le Iyasa, le Batanga ou le Bapuku en esclavage, et vice versa! Il n'est marqué nulle part que le Iyasa s'est accaparé du projet ou d'un financement qui revenait au Banohò ou aux autres.
Au contraire les histoires des grands parents sont parsemées d'épopées de gloire, de fierté et d'alliance.
Alors pourquoi nous obstinons-nous à vouloir aller vers un chemin qui ne nous est pas bénéfique et qui n'a porté de fruits nulle part? Comment justifier autant de haine, de replis identitaire si ce n'est du complexe d'infériorité ?
Quand le groupe des sages douala montait l'histoire des peuples dit ''sawa'' dans les années 50, ils n'ont pas tenus compte des approches ni des connaissances des autres communautés qu'ils citent comme étant descendants de Mbedi. Cela a quelque part contribuer à mettre en exergue le mot ''Batanga'' au détriment des autres composantes. Est-ce donc une raison valable pour les uns et les autres d'être frustrés? En même temps, il n'est prescrit dans aucun texte qui régit notre nation, une interdiction de chaque peuple de raconter sa version de l'histoire. Il ne me convient pas de citer tout près de nous des inventions d'histoire de roi conquérant qui deviennent aujourd'hui vérités historiques (comprendra qui pourra) au point de marquer l'attention du chef de l'État. Chacun peut le faire sans toute fois exclure une vision d'ensemble.

Les jeunes doivent donc s'investir véritablement dans la recherche scientifique car c'est la seule véritable à nous diviser si cela est notre voeux le plus cher.
Je préconise néanmoins le réalisme et invite les uns et les autres à se poser les bonnes questions. Que valons nous aujourd'hui ? Que valons nous spirituellement de Campo à Dikobè? Que valons nous culturellement? que valons nous démographiquement? Que valons nous politiquement ? Que valons nous intellectuellement ?
Si réponses positives ou prometteuses à ces questions il y en a, alors je resterai bon gré loin des actions communautaires aujourd'hui engagées.
En tant que jeunes nous sommes tous victimes quelque part des égocentrismes de nos parents et nos aînés. Nous n'avons toutefois pas légitimité de juger ceux qui ont failli à leur mission. Nul n'a interdit à l'autre de réussir ni de réfléchir. Nous avons le devoir de corriger les choses au plus vite car pour ceux qui ne le savent pas, une langue meurt tous les 3 jours dans le monde: qui dit langue, dit peuple.
Je suis de la jeunesse qui veut l'union de nos communautés, je suis de la jeunesse qui travaille pour cette unification, je suis de la jeunesse qui accepte le sacrifice et refuse le confort éphémère. Je suis de la jeunesse qui envisage les choses pour les 10-15 années à venir.
Toi, à quelle jeunesse est ce que tu t'identifies? À la jeunesse des boîtes de nuit? Des sciences de la tromperie spirituelle ? De la servitude politique et culturelle ? Ou alors à la jeunesse de la prostitution et de la dépravation des mœurs ?
Peux-tu te lever aujourd'hui et dire que tu es le fer de lance de ta communauté ? Peux-tu te lever et déclarer que tu œuvres efficacement pour le développement de ta contré ?
Qu'il soit clair, je suis Banohò, je suis Benga, je suis Bapuku, je suis Batanga, je suis Iyasa par le sang et par la culture : nous sommes liés par mille liens que nous ignorons et que nul ne peut rompre.
Mabele