Drame : pourquoi une élève se suicide à cause du Probatoire ?

Ecclésiaste DEUDJUI
Aug 6, 2023 - 3 Minutes
la jeune Johanna Michelle Owona était âgée de seize ans seulement. Source: actucameroun.com /CC-BY
la jeune Johanna Michelle Owona était âgée de seize ans seulement. Source: actucameroun.com /CC-BY

 

Vous le savez certainement, une jeune fillette de 16 ans s’est suicidée jeudi dernier, après avoir appris son échec à l’examen du Probatoire. Ce phénomène n’est pas nouveau au Cameroun. Chaque année ou presque, on en entend de ce type de drames familiaux, dans lesquels les héros —ou héroïnes— se donnent la mort à cause d’un examen académique, alors qu’ils sont pourtant encore à la fleur de l’âge...

Le cas de la dernière victime en date est symptomatique, même s’il n’est pas isolé. Il s’agissait d’une toute petite adolescente de seize ans seulement, aînée d’une fratrie de trois enfants. Elle fréquentait en classe de Première au collège Montesquieu, dans la ville de Yaoundé. Après avoir consulté son résultat par SMS (grâce à un système qui permet de consulter son statut individuellement, NDLR), elle a été choquée par son insuccès et, sans prévenir personne, elle s’est donnée la mort en ingurgitant une substance appelée « arata tchop die ».
Les pleurs de la famille n’y ont rien fait, et le corps de la jeune fille a immédiatement été transporté à la morgue. Les bruits de couloirs disent qu’elle n’en était pas à sa première tentative, d’ailleurs elle avait déjà essayé de se suicider lorsqu’elle était âgée de... douze ans !

Si ce phénomène tend à se banaliser, il doit forcément y avoir quelques explications. Déjà l’énorme pression que certains parents déposent sur les frêles épaules de leur progéniture, en leur faisant comprendre qu’ils sont dans l’obligation —absolue— de passer leur examen. Ces mêmes parents qui passent le temps à leur rappeler qu’ils ont beaucoup dépensé pour payer la pension scolaire, qu’ils n’ont plus leur propre vie à eux, qu’ils n’auront plus l’argent pour payer la scolarité l’année prochaine en cas d’échec, etc.

Mais il y a aussi que nous sommes dans une société de violence. Une société où on banalise les agressions sexuelles et les images de viols et d’assassinats. Une société où les élèves poignardent leurs enseignants, bref, une société où la mort elle-même ne fait plus du tout trembler même les plus petits enfants.

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Comment, à l’âge de seize ans seulement, peut-on déjà penser à se donner la mort ? Et pour quel motif ? Pourquoi a-t-on rendu la réussite scolaire si importantissime, au point de la transformer en accessoire indispensable de la réussite sociale ? Hein ?
Car derrière la pression parentale, il y a aussi la pression de la cour de récréation. Les adolescentes qui sont dans la puberté ne s’imaginent pas reprendre leur classe de première, tandis que leur petit ami, lui, va s’envoler pour la classe de Terminale. Pire, elles n’osent même pas penser aux autres filles du collège, qui les nargueront certainement l’année prochaine parce qu’elles ont été recalées, et qui les considéreront certainement comme des filles « inférieures ».
Une société du paraître, du m’as-tu-vu, de la concurrence, de la compétition scolaire...

Ce drame est pour moi une véritable tragédie, même si cet acte s’inscrit dans une marée de phénomènes similaires. On a déjà vu plein d’adolescents se donner la mort pour des raisons aussi farfelues les unes que les autres, mais je pense que la société est responsable de tous ces actes déraisonnés. Les parents pour leur pression insoutenable, leur manque de communication et leur absence d’autorité parentale. Les enseignants pour leur manque de suivi psychologique individualisé. La société pour ses valeurs erronées, elle qui croit encore que ceux qui n’ont pas réussi à l’école, n’ont pas droit à une place de choix dans la communauté.
Voilà pourquoi Johanna Michelle Owona s’est suicidée froidement dans sa chambre, à cause d’un diplôme probatoire sans réelle valeur, alors que la jolie petite demoiselle était encore pleine d’avenir.
Pour rappel, elle était âgée de seize ans seulement !

 

Ecclésiaste Deudjui

(+237) 696.469.637

Article publié sur wutsi.com/@/clesh7

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