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Etumbɛ ya Mayi : Articulation essentielle de la commémoration du Mayi

May 24, 2025 - 3 Minutes


Alors que le mois de Mai touche à sa fin, les villages Banoho ayant célébré le Mayi se préparent à accomplir le dernier rite, peut-être le plus essentiel de tous : Idiyedɛ da Mayi, le rituel d’accompagnement ou d’au revoir. Chez les Batanga, les mois consacrés aux commémorations du Mayi et Febuary c'est-à-dire Février et Mai sont considérés comme sacrés. Ce caractère sacré s’exprime à travers deux rituels majeurs qui marquent le début et la fin de la commémoration: Itɛdɛ da etumbɛ ya Mayi/Febuary : le rite d’installation et,

 Idiyedɛ da Mayi/Febuary : le rite de clôture. Ces rituels s’inscrivent dans une logique cohérente de sacralisation de la période de célébration, sous la protection de l’esprit tutélaire du village. 

1- Itɛdɛ da etumbɛ ya Mayi (ou Febuary) : Ce premier rite consiste, pour chaque village, à installer symboliquement l’esprit tutélaire en plantant un arbre fruitier sacré, appelé ‘‘etumbɛ’’. Cet arbre devient alors l’épicentre mystique de la célébration. En d’autres termes, il veille sur le village, protège les enfants, encadre les festivités de tout dérapage et recueille en silence les doléances de la communauté durant tout le mois.

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2- Idiyedɛ da Mayi: À la fin du mois, après les réjouissances et les temps de recueillement, les initiés se réunissent pour dresser le bilan spirituel et communautaire des festivités. Ils procèdent ensuite au rituel d’accompagnement. Le rite d’ ‘‘Idiyedɛ da Mayi’’, marque le moment solennel où l’esprit tutélaire est raccompagné vers son monde. Il ne s’agit pas d’un simple au revoir, mais d’un acte profondément sacré, chargé de symboles, de méditation et de médiation spirituelle. Tout commence sur le site même où a été implanté l’Etumbɛ ya Mayi, l’arbre fruitier sacré planté au début du mois. Sur ce lieu devenu un centre d’énergie mystique, les initiés procèdent à la confection d’un bouquet rituel, tissé à l’aide de jeunes feuilles de palmier, habilement entrelacées pour former une structure végétale sacrée. À sa base de celle-ci, s’ajoutent une sélection précise de plantes médicinales, de fleurs et d’éléments végétaux dont la composition exacte est connue uniquement des initiés. Chaque élément possède une signification spécifique : certains symbolisent la protection, d’autres la guérison, la prospérité ou l’apaisement des conflits.

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Une fois le bouquet sacré constitué, une procession rituelle s’organise à travers le village. Cette marche, rythmée par des chants rituels et des libations versées à la terre et aux ancêtres, constitue une traversée symbolique du village, comme pour réunir les souffrances, les espoirs et les bénédictions de tous. La procession s’achève au bord de l’océan, là où l’esprit tutélaire est censé reprendre sa place. Le bouquet y est déposé dans les vagues, dans un geste de remise et d’offrande. Ce lâcher rituel représente à la fois la libération des doléances du village, la fermeture du temps sacré du Mayi, et le renouvellement du pacte entre les humains et le monde des esprits, avec l’espoir que les forces invisibles œuvreront à la résolution de leurs maux. 

De nos jours, certains villages n’achèvent plus le cycle rituel : ils ouvrent le Mayi/ Febuary sans jamais le refermer. Cette négligence pourrait expliquer, selon certains anciens, de nombreux désordres communautaires, spirituels et sociaux. Le déséquilibre rituel serait ainsi source de malheurs invisibles mais profonds.